Traçabilité de la viande transformée : encore des efforts à faire

L’année 2013 aura été marquée par l’affaire de la viande de cheval: cet enième scandale sanitaire a mis à jour un réel problème de traçabilité de la viande au niveau européen. Hélas, dix mois plus tard, peu de choses ont changé. En est pour preuve l’enquête menée par l’UFC-Que choisir selon laquelle pratiquement 2 produits sur 3 ne mentionnent pas l’origine de la viande.

Près de 10 mois après le scandale de la viande de cheval, 2 produits sur trois contenant de la viande ne mentionnent pas son origine. © Durand Florence/SIPA

A l’occasion du vote d’une mesure sur l’obligation d’étiqueter l’origine de la viande dans les produits transformés (dans le cadre du projet de Loi relatif à la Consommation) par l’Assemblée Nationale, l’association UFC-Que choisir (1) publie les résultats d’une enquête menée en rayon “pour vérifier la mise en œuvre de ces engagements sur 91 produits de consommation courante à base de viande de bœuf (2)“.  Seul 1 produit sur trois mentionne l’origineRésultat, seuls 38 % des produits précisent l’origine de la viande. Néanmoins, 75 % des produits des rayons frais, eux, portent la mention recherchée. “Quant aux mentions valorisantes, telles que ‘’Pur bœuf’’, ‘’Transformé en France’’ ou ‘‘Viande contrôlée avec soin’’,  dans 70% des cas, ce ne sont que des accroches marketing utilisées comme ‘caches misères’ afin de faire oublier aux consommateurs l’opacité sur l’origine de la viande“ note l’association.Autre motif d’insatisfaction, le peu de marques, qu’elles soient nationales ou distributeurs, jouant le jeu : du côté des distributeurs, “Picard et Auchan, réussissent à mentionner l’origine sur un grand nombre de produits (respectivement 83 % et 78 % des produits étudiés)“ et au niveau des marques nationales, “4 marques seulement informent correctement les consommateurs : Panzani, Marie, Findus et Fleury Michon“.

“Un échec de l’autorégulation“Au vu de l’échec de l’autorégulation“, l’UFC-Que choisir “demande au gouvernement français d’intervenir auprès de la Commission Européenne pour que celle-ci confirme la validité de l’initiative française avec le droit communautaire et enjoint la Commission d’élaborer sans délais une proposition réglementaire rendant obligatoire l’étiquetage de l’origine nationale dans les produits transformés“.Dès le mois de février 2013, soit en plein cœur de l’affaire de la

viande de cheval, l’association de consommateur et la Fédération nationale bovine (FNB) avaient demandé au gouvernement d’instaurer “sans délai“ un étiquetage précis sur l’origine des ingrédients pour tous les produits à base de viande. Aujourd’hui,  “on attend toujours de Bruxelles sur l’obligation d’étiqueter l’origine de la viande dans les produits transformés“ déplore l’association pour qui “il est essentiel de “légiférer pour garantir aux consommateurs une information essentielle à la traçabilité et à la sécurité sanitaire“.
Un projet de règlement pour 2015
Interrogé à ce sujet, le ministère de l’agriculture précise que “le projet de règlement relatif à l’étiquetage de l’origine pour les viandes porcines, ovines, caprines et de volailles a reçu un vote favorable ce 5 décembre à Bruxelles et devrait être publié le 13 décembre 2013 au plus tard  pour entrer en vigueur le 1er avril 2015“ (3).
Mais ce projet de règlement ne concerne pas les viandes transformées, il concerne uniquement  la viande vendue en tant que telle. D’après ce projet, l’origine de la viande sera définie par  trois critères : “né, élevé et abattu“. Par exemple, un bœuf peut être né et élevé en Italie et avoir été abattu en France. “Malgré les demandes répétées du Gouvernement français pour faire évoluer la législation, aucun accord n’a été trouvé au niveau européen pour l’étiquetage de la viande en tant qu’ingrédient (c’est-à-dire la viande transformée, NDLR)“ précise Patrick Dehaumont, Directeur général de l’Alimentation au ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt.
Comment expliquer un tel blocage ? Pour lui, “c’est avant tout lié aux contraintes techniques donc économiques qui pèseraient sur les producteurs et les industriels en cas d’obligations légales en matière d’étiquetage“.
Néanmoins, nuance-t-il, “la traçabilité amont-aval est totalement sous contrôle.  Il est tout à fait possible, de pouvoir connaître, le cas échéant,  l’origine d’un lot éventuellement contaminé et de le rappeler“.  Yamina Saïdj(1)   

Indication de l’origine de la viande de bœuf dans les produits transformés, enquête UFC-Que choisir, 10 décembre 2013(2)    Produits de grande consommation à base de viande de bœuf (lasagnes, raviolis, hachis Parmentier, bœuf bourguignon  etc … ) de marques nationales et de marques de distributeurs, proposés au  rayons frais, surgelés, conserves, barquettes plastiques et sauces bolognaises.(3)    Petit déjeuner de presse organisé au ministère de l’Agriculture, 11 décembre 2013